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Les juges de l’action administrative 2021- 2022 - www.lex-publica.com - © M. Coulibaly  42/63

            III - L’exercice des attributions consultatives des juridictions
            administratives


            A - Modalités
                   Le Conseil d'État n’est pas seulement juge, il est aussi conseiller du Gouvernement. La con-
            sultation revêt deux formes :
                   1. La consultation obligatoire :
                        sur les projets de lois et d'ordonnances en vertu des articles 39 et 38 de la Constitution.
            Ces dispositions ne concernent ni les propositions de lois ni les amendements.
                        sur certains projets de textes administratifs - décrets ou autres - soit en vertu d’une loi
            ou d’un décret, soit en vertu de la Constitution. Par exemple l’article 37, alinéa 2, de la Constitution :
            « Les matières autres que celles qui sont du domaine de la loi ont un caractère réglementaire. Les textes de
            forme législative intervenus en ces matières avant l'entrée en vigueur de la Constitution peuvent être modi-
            fiés par décret pris après avis du Conseil d'État. » Cf. aussi, certaines déclarations d’utilité publique.
                   Les textes édictés après une consultation obligatoire du Conseil d'État comportent, dans leurs
            visas, la mention « Le Conseil d'État entendu » - CE, Ass., 3 juillet 1998, Syndicat national de l’envi-
            ronnement CFDT et autres, n° 177248. Un décret en Conseil d'État est donc un décret pris « le Con-
            seil d'État entendu ».
                   Quelle est la sanction du défaut de consultation du Conseil d’État lorsqu’une telle consul-
            tation est obligatoire ?
                   Réponse du Conseil d’État lui-même :
                   « [Considérant que] saisi d'un projet de texte, le Conseil d'Etat donne son avis et propose les
                   modifications qu'il juge nécessaires (...) " ; qu'eu égard au rôle ainsi dévolu au Conseil d'Etat,
                   le défaut de saisine de ce dernier entraîne l'illégalité des actes administratifs dont le projet
                   devait lui être obligatoirement soumis ; que cette illégalité constitue un moyen d'ordre public
                   que le juge administratif doit, le cas échéant, soulever d'office ; » - CE, 17 juillet 2013, Syndicat
                   national des professionnels de santé au travail et autres, n° 358109.
                   2. La consultation facultative
                        sur les autres projets de décret ou autres textes d’origine gouvernementale,
                        sur les propositions de lois. En effet, la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a
            introduit dans l’article 39 de la Constitution un dernier alinéa qui dispose : « Dans les conditions
            prévues par la loi, le président d’une assemblée peut soumettre pour avis au Conseil d’État, avant
            son examen en commission, une proposition de loi déposée par l’un des membres de cette assem-
            blée, sauf si ce dernier s’y oppose. »
                   Les textes pris après une consultation facultative du Conseil d'État comportent, dans leurs
            visas, la mention « Vu l’avis du Conseil d'État ».
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                     Dans tous les cas, le Conseil d'État vérifie la rectitude formelle  et matérielle du texte qui lui
            est soumis.
                   Que la consultation ait été obligatoire ou facultative, en principe, l’avis n’est pas contraignant
            pour le Gouvernement. Deux correctifs, toutefois :




            1  Cf. CE, Sect., 3 juillet 1959, Feldzer. Une virgule peut tout changer…Un texte prévoyait que les candidats à certaines
            fonctions de l’armée de l’air devaient faire preuve de “connaissances générales techniques et tactiques.” S’il n’y a pas
            de virgule entre générales et techniques, cela signifie que les connaissances techniques sont générales. Le ministre a
            fait comme s’il y avait une virgule ; et les candidats se sont vu imposer également une épreuve de culture générale. Le
            Conseil a jugé que c’était illégal : faute de virgule, seules deux épreuves s’imposaient - technique et tactique - et non
            trois. Voir, aussi, CE, Sect., 26 avril 1963, Dengremont.
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