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TD – 2020-2021 - www.lex-publica.com - © M. Coulibaly 15/33
Le 15 décembre 2002, le Secrétaire général des Nations Unies adresse au ministre myanmarien des
Affaires étrangères une note verbale dont voici la substance :
Aux termes de la section 22 de l'article VI de la convention sur les privilèges et immunités des
Nations Unies adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 13 février 1946 (ci-après
dénommée "la Convention"), les experts, lorsqu'ils accomplissent une mission pour l'Organisa-
tion des Nations Unies, jouissent, pendant la durée de cette mission, y compris le temps du
voyage, des privilèges et immunités nécessaires pour exercer leurs fonctions en toute indépen-
dance. Ils jouissent en particulier de l’immunité de toute juridiction en ce qui concerne les actes
accomplis par eux au cours de leur mission (y compris leurs paroles et écrits ; article VI, sec-
tion 22, alinéa b).
N'ayant ni la qualité de représentants d'États Membres de l'Organisation des Nations Unies ni
celle de fonctionnaires de l'Organisation, et s'acquittant pour cette dernière en toute indépendance
des fonctions prévues par le mandat de la Commission des droits de l'homme, les rapporteurs
spéciaux de celle-ci doivent être regardés comme des experts en missions au sens de la section
22 de l'article VI de la Convention.
Les termes sur lesquels les entreprises demanderesses fondent leur plainte dans cette affaire ont
été employés par le rapporteur spécial, M. Enkhbayar, dans le cadre de sa mission.
En conséquence, le Secrétaire général conserve à M. Enkhbayar son immunité de juridiction à
cet égard, conformément à la section 23 de l’article VI de la Convention.
Le Gouvernement du Myanmar est tenu d'aviser les tribunaux myanmariens de cette conclusion
du Secrétaire général afin qu'il soit donné effet aux obligations internationales du Myanmar et
que soit respectée l'immunité de M. Enkhbayar.
Réconforté par cette note verbale, M. Enkhbayar excipe de son immunité de juridiction.
En vain.
Le 20 décembre 2002, lors d’un point de presse, le ministre myanmarien des Affaires étrangères dé-
clare :
« La justice myanmarienne ne peut admettre que l'accusé, M. Enkhbayar, soit absolument protégé
par l'immunité qu'il revendique, en partie parce qu'elle considère que la note verbale du Secrétaire
général des Nations Unies est une mise au point plutôt insipide, une simple opinion pouvant dif-
ficilement servir de preuve et n'ayant aucune force contraignante.
Le Secrétaire général des Nations Unies n'est pas investi du pouvoir exclusif de déterminer si des
paroles ont été prononcées au cours d'une mission pour les Nations Unies au sens de l'alinéa b de
la section 22 de l'article VI de la Convention.
Indépendance de la justice myanmarienne oblige, la procédure doit suivre son cours. »
Conclusion cynique s’il en est…
*
Le 27 décembre 2002, le Secrétaire général des Nations Unies informe, par une note verbale, le mi-
nistre myanmarien des Affaires étrangères qu'un différend sur l’étendue des pouvoirs conférés par la
Convention au Secrétaire général semble opposer l'Organisation des Nations Unies et le Gouverne-
ment myanmarien, et il évoque la possibilité d'en saisir, pour avis consultatif, la Cour internationale
de Justice, conformément à la section 30 de la Convention.
Par une lettre en date du 21 janvier 2003, enregistrée au Greffe de la Cour internationale de Justice le
24 janvier 2003, le Secrétaire général des Nations Unies communique officiellement au Greffier la
décision prise par le Conseil économique et social de l'Organisation des Nations Unies de soumettre
le différend à la Cour aux fins d’avis consultatif.
La décision n° 2003/08, dont les textes français et anglais certifiés conformes sont joints à la lettre du
Secrétaire général, est ainsi libellée :
"Le Conseil économique et social,