Page 13 - CAS PRATIQUE
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           VI. Supplément : Le rasoir d’Occam ou le principe de l’éco-
                 nomie du raisonnement dans la jurisprudence de la Cour




            Nota bene : La connaissance de ce qui suit est nécessaire à la formation, car elle fait gagner du temps
            dans une démonstration ; elle n’est cependant pas indispensable en vue de l’examen.


            A. Considérations d’ordre général

               Les arguments que les parties à un procès invoquent à l’appui de leurs conclusions ou pré-
            tentions sont appelés, on le sait, des moyens.

              Ź Tout moyen juridique comporte deux dimensions :

                  ƒ une dimension proprement juridique : on établit cette dimension en répondant à la question
            « S’il était retenu, ce moyen aurait-il l’effet escompté par la partie qui l’invoque ? » ou à la question
            « Ce moyen est-il pertinent ? » Une réponse négative fera dire au juge que le moyen est inopérant.
                  La dimension proprement juridique d’un moyen correspond donc à la pertinence de ce moyen.

                  ƒ une dimension purement factuelle : on établit cette dimension en répondant à la question
            « Le moyen invoqué repose-t-il sur des faits avérés ? » ou à la question « Les faits invoqués au sou-
            tien du moyen correspondent-ils à la réalité ? » Une réponse négative fera dire au juge que le moyen
            manque en fait.
               La dimension purement factuelle d’un moyen correspond donc à la matérialité des faits sur les-
            quels se fonde ce moyen. Entre parenthèses, les faits ne correspondent pas toujours à des enchaîne-
            ments ou successions d’événements ; le sens commun est parfois trompeur.

              Ź Réfuter un moyen revient, par conséquent, à contester et à rejeter
                  ƒ sa dimension proprement juridique : on démontre que le moyen est inopérant, c’est-à-dire
            qu’il est dépourvu de pertinence ;
                  ƒ et/ou sa dimension purement factuelle : on démontre que le moyen manque en fait, c’est-à-
            dire que les faits sur lesquels se fonde ce moyen ne sont pas avérés, constants.

               ¾ On peut bien sûr s’efforcer de toujours réfuter en même temps les deux dimensions.
               ¾ Mais ce serait souvent une perte de temps. En effet, si l’une quelconque des deux dimensions
            fait défaut, le moyen ne sera pas retenu : un moyen jugé inopérant ne sera pas retenu même s’il est
            reconnu fondé en fait, et inversement.

               ¾ Une considération additionnelle s’impose : la dimension purement factuelle d’un moyen est
            plus ardue à établir ou à contester que sa dimension proprement juridique, car elle nécessite l’usage
            de moyens d’investigation importants. La longueur parfois déraisonnable des procédures conten-
            tieuses est souvent imputable aux enquêtes et expertises diligentées à l’effet d’établir la matérialité
            des faits.
              Ź Voilà pourquoi le souci de l’efficacité et de l’économie du raisonnement    (le fameux rasoir
            d’Occam) et de l’analyse doit nous conduire à la conclusion suivante, qui est aussi celle de la
                  :
            Cour si nous voulons réfuter un moyen, nous devons nous attacher d’abord à évaluer, et, le cas
            échéant, à réfuter, sa dimension proprement juridique.
               ¾ Si nous démontrons que le moyen est inopérant, nous ne perdrons pas notre temps à évaluer
            sa dimension purement factuelle, puisqu’un moyen jugé inopérant ne sera pas retenu même s’il est
            reconnu fondé en fait, et inversement d’ailleurs.
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