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CHAPITRE III  1/2 – 2022-2023 - www.lex-publica.com - © M. Coulibaly  38/38

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                             ‰ Exemple instructif de logomachie diplomatique



                                 L’incident de Janina entre la Grèce et l’Italie

                 Le 27 août 1923, les membres italiens de la Commission internationale chargée par la Conférence
         des ambassadeurs de délimiter la frontière gréco-albanaise, étaient assassinés par des inconnus, à coups de
         revolver, alors qu'ils se trouvaient en voyage, près de la frontière, aux environs de Janina.

                 Dès le surlendemain, le 29 août,  le gouvernement italien  chargea son ministre à Athènes de re-
         mettre au gouvernement hellénique, avec la sommation d'y répondre dans le plus bref délai, une Note dans
         laquelle il demanda :
                  « 1. Des excuses officielles dans la forme la plus large à présenter au gouvernement italien en les formulant
         à la légation royale à Athènes par l'intermédiaire de l'autorité militaire suprême hellénique ;
                 2. Une cérémonie funèbre solennelle pour les victimes du massacre à célébrer à la cathédrale catholique
         d'Athènes en présence de tous les membres du gouvernement ;
                 3. Des honneurs rendus au drapeau italien par la flotte hellénique dans le port du Pirée à une division navale
         qui s'y rendra spécialement, et cela par des salves de vingt et un coups de canon tirés par les navires helléniques,
         qui devront arborer pendant les salves le drapeau italien sur leurs propres mâts ;
                 4. La plus sévère enquête poursuivie par les autorités grecques sur les lieux du massacre avec l'assistance
         de l'attaché militaire royal italien, le colonel Perrone, dont la sécurité est placée sous la responsabilité du gouver-
         nement hellénique, enquête qui devra être effectuée dans le délai de cinq jours à partir de l'acceptation des pré-
         sentes requêtes ;
                 5. La punition capitale de tous les coupables ;
                 6. Une indemnité de 80 millions de lires italiennes, à verser dans le délai de cinq jours à partir de l'accepta-
         tion des présentes requêtes ;
                 7. Les honneurs militaires rendus aux corps des victimes au moment de l'embarquement à Preveza, sur un
         navire italien ».

                 À cette Note le gouvernement hellénique répondit, le 30 août, qu'il considérait comme injuste
         l'accusation du gouvernement italien qui le rendait responsable d'une offense grave envers l'Italie. Aussi,
         déclara-t-il, « se trouver dans l'impossibilité d'accepter les demandes formulées aux n° 4, 5 et 6 de la Note
         verbale italienne, qui portent atteinte à la souveraineté et à l'honneur de l'État grec ». Néanmoins, prenant
         en considération le fait qu'un attentat odieux a été commis en territoire grec contre des ressortissants d'une
         puissance chargée d'une mission internationale, le gouvernement hellénique ajouta qu'il acceptait :
                 1° D'exprimer ses regrets au gouvernement italien dans la forme la plus large et la plus officielle : à cet effet,
         le ministre d'Italie recevrait la visite du commandant de place d'Athènes ;
                 2° De faire célébrer à la mémoire des victimes, dans l'église catholique d'Athènes, un service religieux au-
         quel assisteraient tous les membres du gouvernement ;
                 3° De faire rendre, le même jour, les honneurs au gouvernement italien de la manière suivante : un déta-
         chement de la garnison d'Athènes se rendrait devant la légation italienne dont il saluerait le drapeau en rendant
         les honneurs réglementaires ;
                 4° De rendre tous les honneurs de la même manière la plus solennelle aux victimes à Preveza, au moment
         où leurs dépouilles mortelles seraient transportées à bord du navire italien.
                 Et, en même temps, la Grèce s'adressa au Conseil de la Société des Nations, aux fins d'obtenir à l'amiable
         un juste règlement en vertu des articles 12 et 18 du Pacte.
                 Mais, le jour suivant, l'Italie, ayant considéré cette Note comme insuffisante, fit occuper, après un bombar-
         dement de courte durée mais qui causa la mort de plusieurs personnes innocentes, l'île de Corfou comme gage pour
         la réalisation de ses demandes.„
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