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TD – 2021-2022 - www.lex-publica.com - © M. Coulibaly  5/81


                                     Considérations d’ordre méthodologique :


                  Tout moyen juridique comporte deux dimensions :

                  - une dimension proprement juridique : on établit cette dimension en répondant à la ques-
               tion « S’il était retenu, ce moyen aurait-il l’effet escompté par la partie qui l’invoque ? » ou à
               la question « Ce moyen est-il pertinent ? » Une réponse négative fera dire au juge que le moyen
               est inopérant.
                  La  dimension  proprement  juridique d’un  moyen  correspond  donc  à  la  pertinence  de  ce
               moyen.

                  - une dimension purement factuelle : on établit cette dimension en répondant à la question
               « Le moyen invoqué repose-t-il sur des faits avérés ? » ou à la question « Les faits invoqués au
               soutien du moyen correspondent-ils à la réalité ? » Une réponse négative fera dire au juge que
               le moyen manque en fait.
                  La dimension purement factuelle d’un moyen correspond donc à la matérialité des faits sur
               lesquels se fonde ce moyen. Entre parenthèses, les faits ne correspondent pas toujours à des
               enchaînements ou successions d’événements ; le sens commun est parfois trompeur.


                  Réfuter un moyen revient, par conséquent, à contester et à rejeter
                  - sa dimension proprement juridique : on démontre que le moyen est inopérant, c’est-à-dire
               qu’il est dépourvu de pertinence ;
                  - et/ou sa dimension purement factuelle : on démontre que le moyen manque en fait, c’est-
               à-dire que les faits sur lesquels se fonde ce moyen ne sont pas avérés, constants.

                  On peut bien sûr s’efforcer de toujours réfuter en même temps les deux dimensions.
                  Mais ce serait souvent une perte de temps. En effet, si l’une quelconque des deux dimensions
               fait défaut, le moyen ne sera pas retenu : un moyen jugé inopérant ne sera pas retenu même s’il
               est reconnu fondé en fait, et inversement.
                  Une considération additionnelle s’impose : la dimension purement factuelle d’un moyen est
               plus ardue à établir ou à contester que sa dimension proprement juridique, car elle nécessite
               l’usage de moyens d’investigation importants. La longueur parfois déraisonnable des procé-
               dures contentieuses est souvent imputable aux enquêtes et expertises diligentées à l’effet d’éta-
               blir la matérialité des faits.
                  Voilà pourquoi le souci de l’efficacité et de l’économie du raisonnement (le fameux rasoir
               d’Occam) et de l’analyse doit nous conduire à la conclusion suivante, qui est aussi celle de
               la Cour : si nous voulons réfuter un moyen, nous devons nous attacher d’abord à évaluer, et, le
               cas échéant, à réfuter, sa dimension proprement juridique.
                  Si nous démontrons que le moyen est inopérant, nous ne perdrons pas notre temps à évaluer
               sa dimension purement factuelle, puisqu’un moyen jugé inopérant ne sera pas retenu même s’il
               est reconnu fondé en fait, et inversement d’ailleurs.
                  Bien évidemment, si le moyen n’est pas inopérant, c’est-à-dire s’il est pertinent, nous aurons
               à examiner sa dimension purement factuelle.
                  En somme, une manière pragmatique d’appliquer les règles pertinentes aux faits per-
               tinents.

                  Mise en garde : Ainsi qu’il ressort de ce qui précède, le rasoir d’Occam doit être employé
               de la manière suivante :
                  1. Vous examinez le moyen soumis au juge,
                  2. Vous décomposez le raisonnement qui sous-tend ce moyen :
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