Page 26 - td_ctxinter_3_consultcas-c_2019-2020
P. 26
TD – 2019-2020 - www.lex-publica.com - © M. Coulibaly 26/81
Le lien juridique entre souveraineté et domaine réservé ressort clairement des dispositions
de l'article 2, paragraphe 7, de la Charte :
« Aucune disposition de la présente Charte n'autorise les Nations Unies à intervenir
dans des affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d'un État
ni n'oblige les Membres à soumettre des affaires de ce genre à une procédure de règle-
ment aux termes de la présente Charte; toutefois, ce principe ne porte en rien atteinte à
l'application des mesures de coercition prévues au Chapitre VII. »
Etant donné que le concept de domaine réservé est juridique comme toute compétence dis-
crétionnaire, il faut disposer d'un critère pour le circonscrire. Et ce critère se trouve dans le droit
international.
Il n’appartient pas à l’État de délimiter son domaine réservé, car sur la scène internationale
l’État n’a pas la compétence de la compétence (kompetenzkopetenz, comme disait la doctrine
allemande avec Laband et Jellinek).
La Cour permanente de Justice internationale précise :
« A un certain point de vue, on pourrait bien dire que la compétence d'un État est
exclusive dans les limites tracées par le droit international, ce terme, pris dans son sens
large, comprenant à la fois le droit coutumier et le droit conventionnel général ou parti-
culier.
Les mots «compétence exclusive » semblent plutôt envisager certaines matières qui,
bien que pouvant toucher de très près aux intérêts de plus d'un État, ne sont pas, en prin-
cipe, réglées par le droit international. En ce qui concerne ces matières, chaque État est
seul maître de ses décisions.
La question de savoir si une certaine matière rentre ou ne rentre pas dans le
domaine exclusif d'un État est une question essentiellement relative: elle dépend du
développement des rapports internationaux. C'est ainsi que, dans l'état actuel du droit
international, les questions de nationalité sont, en principe, de l'avis de la Cour, comprises
dans ce domaine réservé.
Aux fins du présent avis, il suffit de remarquer qu'il se peut très bien que, dans une
matière qui, comme celle de la nationalité, n'est pas, en principe, réglée par le droit inter-
national, la liberté de l'État de disposer à son gré soit néanmoins restreinte par des enga-
gements qu'il aurait pris envers d'autres États.» - Décrets de nationalité promulgués
en Tunisie et au Maroc, Avis consultatif du 7 février 1923.
***
Conclusion sur le présupposé n°2 de la prémisse majeure du moyen n°2 :
Nous devons donc affirmer, avec toute la force de la jurisprudence, qu’une question portant
sur une matière comprise dans le domaine réservé des États n’est pas une question relevant du
droit international, mais une question relevant du droit interne.
Conclusion sur la prémisse majeure du moyen n°2 :
Nous sommes également obligé de tenir pour établie la prémisse majeure du raisonnement
qui sous-tend le moyen n°2 du Myanmar : la Cour doit refuser de donner un avis consultatif sur
toute question portant sur une matière comprise dans le domaine réservé des États.