Page 37 - legalite2_dag_2022-2023_light_v2
P. 37
La légalité 2/2 – 2022-2023 - www.lex-publica.com - © M. Coulibaly 37/45
1 – Circonstances exceptionnelles et situations d’urgence
Les circonstances exceptionnelles ne doivent pas être confondues avec l’urgence (ou les situations
d’urgence).
Certes, dans les deux cas, le normal cède le pas à l’anormal.
Toutefois, par rapport aux situations d’urgence, les circonstances exceptionnelles traduisent un
plus haut degré d’anormalité.
On a pu souligner à juste titre : « Les circonstances exceptionnelles impliquent toujours ou presque
toujours la notion d’urgence, mais la réciproque n’est pas vraie, et une situation qui exige d’urgence
une solution n’a pas par là-même le caractère d’une situation de circonstances exceptionnelles. » 1
Si les deux notions juridiques (Urgence et circonstances exceptionnelles) se distinguent par leur
nature, elles diffèrent également par leurs effets.
¾ Dans une situation d’urgence, le juge admet qu’une autorité administrative puisse
empiéter sur la compétence d’une autre autorité administrative,
ou méconnaître les règles de forme ou de procédure obligatoires.
¾ Mais, contrairement aux circonstances exceptionnelles, l’urgence ne permet pas à une auto-
rité administrative de sortir des limites de la compétence de l’administration. Par exemple, en cas
d’urgence, l’autorité administrative ne peut prendre des mesures qui relèvent des pouvoirs législatif
ou juridictionnel.
¾ Ainsi donc, comme les circonstances exceptionnelles, l’urgence étend les pouvoirs de l’auto-
rité administrative. Mais, au contraire des circonstances exceptionnelles, l’urgence ne change pas la
nature des pouvoirs de l’autorité administrative.
**
2 – Circonstances exceptionnelles et situations institutionnalisées
Les circonstances exceptionnelles ne doivent pas être confondues avec des situations comme celles
que décrit la législation sur l’état de siège et l’état d’urgence.
Il est vrai que cette législation constitue « un véritable condensé des règles dégagées par la juris-
prudence en fait de circonstances exceptionnelles. » 2
Mais justement, ce constat montre bien la différence : l’état de siège et l’état d’urgence sont prévus
par des dispositions écrites, alors que les circonstances exceptionnelles sont une construction du juge
administratif.
Au demeurant, la déclaration de l’état de siège ou de l’état d’urgence n’exclut pas l’application de
la théorie jurisprudentielle des circonstances exceptionnelles.
La raison en est simple : « Les textes, même prévoyant des circonstances exceptionnelles, ne peuvent
pas prévoir toutes les situations qui peuvent se produire : il faut alors combiner le droit écrit et le
droit prétorien. » 3
*
1 Raymond Odent, op. cit. p. 376.
2 Raymond Odent, op. cit. p. 387
3 Raymond Odent, op. cit. p. 387