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Contentieux international : CHAPITRE II - www.lex-publica.com - © M. Coulibaly             13/23

            SECTION II : La soumission des différends à l’arbitrage

            I - L'organe arbitral
                  C'est de l'accord des parties que procède la constitution de l'organe arbitral. En effet, l'arbitrage
            international a pour objet le règlement de litiges entre des sujets de droit international par des juges
            de leurs choix - article 37 de la convention de La Haye du 18 octobre 1907. Il repose, avant tout, sur
            le consentement et la confiance des parties.
                  Le plus souvent, l'organe arbitral est un organe ad hoc. Il est établi pour le règlement d’un litige
            donné et généralement pour une durée prédéterminée. Cependant, les parties confient parfois l'arbi-
            trage à un organe permanent qui a d'autres compétences. Par exemple à l’Assemblée générale des
            Nations Unies. Ainsi le traité de paix de 1947 l’avait-il chargée de fixer le sort des colonies italiennes.
            Et les parties s’étaient engagées à s’incliner devant la résolution qu'elle prendrait. Cette hypothèse
            reste marginale.
                  L'organe ad hoc peut revêtir plusieurs formes. Mais cette diversité formelle n’affecte pas l’uni-
            versalité des règles de fond.

            A - Forme juridique

            1 - L’arbitrage unipersonnel
                   Dans cette hypothèse, un arbitre unique dit le droit. Naguère, il tirait son autorité de sa qualité
            de chef d’État, d’où les dénominations d’arbitrage par chef d'État, d’arbitrage royal ou d’arbitrage
            par souverain. Essentiellement européen, ce type d’arbitrage se rattache à l’idée d’une justice hiérar-
            chique. Il a revêtu deux formes successives :
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                  - Au moyen âge, le Pape et l'Empereur  se disputent la prééminence politique en Europe. Il est
            donc tout naturel de prendre l'un ou l'autre comme arbitre. Ainsi, l'arbitrage par chef d’État a-t-il un
            fondement positivement hiérarchique. L'arbitrage de l'Empereur ou du Pape est le jugement du supé-
            rieur temporel ou spirituel ;
                  - Mais au XVIIème siècle, le Saint Empire romain germanique se décompose, en même temps
            que s'affirment la monarchie absolue et la notion d'État princier. Le Pape et l'Empereur perdent de
            leur autorité temporelle. La Guerre de Trente Ans se termine par les traités de Westphalie des 14-24
            octobre 1648 : traité d’Osnabrück, traité de Munster, véritable charte constitutionnelle de l’Europe.
            Les relations internationales sont désormais fondées sur le principe de l’égalité souveraine, comme
            l’a pressenti Jean Bodin dans Les six livres de la République. Chacun des rois est devenu « empereur
            en son royaume » - adage énoncé sous Philippe le Bel, au début du XIVe siècle. Au jugement par les
            supérieurs succède le jugement par les pairs.
                  Formellement unipersonnel, l'arbitrage par chef d'État est presque toujours matériellement col-
            légial. Bien souvent, l'arbitrage attribué à un chef d'État émane en réalité du gouvernement in corpore.
                   Exemples :
                   - l'arbitrage du Tsar Alexandre III entre la France et les Pays-Bas au sujet de la frontière des
            deux Guyane - sentence des 13 - 25 mai 1891 ;
                   - l'arbitrage du roi d'Italie entre la France et le Mexique dans l'affaire de l'île de Clipperton -
            sentence du 28 janvier 1931 ;
                   - l’arbitrage de la reine Élisabeth II dans le différend frontalier opposant l’Argentine et le Chili
            - sentence, 9 décembre 1966 ;
                  Sur le fondement de l'uti possidetis de 1819, l'arbitrage du roi d'Espagne a souvent été sollicité
            par les États latino-américains. Cf., par exemple, Honduras c/ Nicaragua, 23 décembre 1906; sentence
            contestée devant la Cour internationale de Justice, arrêt du 18 novembre 1960.



            1  Ces “ deux moitiés de Dieu ”, dixit Victor Hugo. Cf. la théorie des deux glaives - glaive du sacerdoce et glaive séculier -
            énoncée par le pape Grégoire VII. Le Pape et l’Empereur souhaitent, tous les deux, créer une sorte de Res publica chris-
            tiana sub deo. Rappelons que le moyen âge commence en 476 - chute de l’Empire romain d’Occident - et s’achève en
            1453 - prise de Constantinople.
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