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CHAPITRE III  1/2 – 2022-2023 - www.lex-publica.com - © M. Coulibaly  17/38

             ƒ ou si le fait litigieux a causé à l’État victime un dommage comparable ou supérieur à
                celui que l’État mis en cause voulait éviter.
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         2 – L’existence d’un préjudice


         „ Le préjudice est considéré ici comme synonyme de dommage nonobstant certaines dissertations
         doctrinales de droit civil. Distinguer les deux termes n’a aucune pertinence devant le juge.

         „ Que le préjudice soit une condition sine qua non de l’engagement de la responsabilité, cela dépend
         de l’obligation violée.

          Toutefois, même si la règle n’est pas absolue, le contenu de la plupart des normes primaires est
         tel qu’en fait la nécessité d’un préjudice est souvent admise comme condition d’engagement de la
         responsabilité.

         „ D’une manière générale, un dommage (ou préjudice) peut avoir été causé
             ƒ directement à un État
             ƒ ou à la personne privée dont l’État défend les droits et intérêt par le mécanisme de la protection
               diplomatique.
         Il revêt soit un caractère matériel, soit un caractère immatériel (ou moral). Dans ces deux hypothèses,
         qui ne s’excluent pas, il peut affecter l’environnement.

         a – Préjudice matériel et préjudice immatériel ou moral

         „ Un préjudice matériel, quelles qu’en soient la nature et l’étendue, suffit à engager la responsabilité
         de son auteur. La jurisprudence internationale a même admis l’indemnisation du gain manqué ou
         lucrum cessans.
         „ En revanche, traditionnellement, la jurisprudence se refusait à indemniser les préjudices moraux.
         L’arbitre Ralston (31 juillet 1950, France/Venezuela) rappelle le fondement de cette attitude :

               « Les sentiments ne sont pas mesurables en bolívars ou en livres sterling ».
         „ Le revirement de jurisprudence s’est produit dans les affaires du Lusitania – Navire torpillé par un
                                                         er
         sous-marin allemand, sentences arbitrales du 1  novembre 1923.
         Anzilotti salue ce changement de cap des juges : « L’honneur et la dignité des États l’emportent de
         beaucoup sur les intérêts matériels ».

          De nos jours, plus aucun doute ne subsiste : un préjudice immatériel (ou moral) est susceptible
         de réparation.
         „ Dans l’affaire Ahmadou Sadio Diallo, la Cour internationale de Justice a énoncé deux précisions au
         sujet des préjudices immatériels (ou moraux) :

             1.« [U]n préjudice immatériel peut être établi même en l’absence d’éléments de preuve
                précis. »
             2.« La détermination du montant de l’indemnité due à raison d’un préjudice immatériel
                repose nécessairement sur des considérations d’équité. » – Ahmadou Sadio Diallo (Ré-
                publique de Guinée c. République démocratique du Congo), Indemnisation due par la Ré-
                publique Démocratique du Congo à la République de Guinée, Arrêt du 19 juin 2012, C.I.J.
                Recueil 2012, pp. 10-11.
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